Henri NEYRAND
Pour une histoire de roses
Une nouvelle qui se passe en Vendée !
Dans le cadre d’un concours (pour lequel je n’ai pas été dans le trio de tête).
Mais cela ne fait rien, c’est amusant et un bon exercice dans le cadre de mon projet d’écriture !
Bonne lecture.
Cela faisait deux jours qu' André était aux Sables d'Olonne.
Il avait toujours aimé se promener sur le remblai, face à la mer avec le bruissement des vagues qui venait se mêler aux bruits de conversation des badauds et à celui des voitures.
Ce week-end de Pentecôte avait attiré la foule de vacanciers qui, comme André, appréciait particulièrement le soleil de printemps apportant une note joyeuse après cette année difficile de confinements à répétition.
C'était aujourd'hui son anniversaire, mais André avait envie de pleurer !
En passant devant le café “Les Flots” avec ses tables en terrasse surplombant la mer, il décida que, bien que seul, il allait s'offrir un apéritif.
C'était ici qu'ils avaient l'habitude de prendre un verre avec Marjorie.
Son dernier anniversaire, il l’avait fêté ici avec elle. Elle avait souhaité une coupe de champagne Roederer. L'instant avait été magique.
Aujourd'hui les deux femmes qui avaient le plus compté dans sa vie n'étaient plus là pour l'accompagner le jour de ses 33 ans !
André venait de passer deux heures éprouvantes devant sa mère, couchée sur un lit glacial au funérarium des Sables. Il était resté seul,dans cette petite chambre funéraire.
Sa mère avait un visage apaisé. Il l’avait trouvée très belle dans la robe qu'il avait choisie pour son dernier voyage avec le bouquet de roses rouges qu’il lui avait glissé dans les mains.
Quelle horreur quand il avait reçu ce coup de téléphone de l'hôpital lui annonçant à la fois que sa mère avait attrapé le COVID et qu'elle venait d’en mourir.
Il était le fils unique de cette femme de caractère qui avait tout sacrifié pour lui permettre de faire ses études qu'il avait brillamment réussies en entrant à HEC.
Cette femme à qui il devait le jour et pour qui il se serait jeté au fond d'un puits, il lui devait également son plus grand malheur.
Marjorie, en cet instant il la revoyait sur cette plage avec son maillot rouge qui illuminait merveilleusement son corps élancé. En repensant à Marjorie une détresse profonde le prenait tellement il l’avait aimée, caressée, adulée.
Marjorie était de père rwandais et de mère française. Elle avait quitté son pays lors des événements il y a 30 ans et avait grandie à Paris.
Élève brillante, elle avait réussi la même école qu'André. C’est seulement quelques années après leur sortie d’HEC que, se retrouvant à l’occasion d’une soirée d’anciens, soudainement, ils éprouvèrent une attirance irrépressible l'un pour l'autre.
Il y a deux ans, André avait présenté Marjorie à sa mère qui n'avait pu accepter que son fils, pour qui elle avait tout sacrifié, n'épouse pas une femme selon ses critères.
Tiraillé entre sa mère et Marjorie, André n’avait pas réussi à trancher.
Les nuits de larmes et de supplications de sa mère bouleversaient André et blessaient cruellement Marjorie. Au bout d’un an leur couple partait de plus en plus en quenouille et, c’est d’un commun accord, qu’ils s’étaient séparés il y a 6 mois.
Perdu dans son chagrin, André n'aurait pas dû, mais sans trop y penser il commanda à la serveuse une coupe de champagne. Dès la première gorgée avec en bouche le picotement du liquide, ce fut un flot de souvenirs qui le submergèrent et lui firent monter les larmes aux yeux.
Il se souvenait des éclats de rire, des voyages, des étreintes qui l’avaient comblé au-delà de tout ce qu'il aurait pu imaginer.
Fils adulé d'une mère célibataire, il n’avait su choisir, et pour son plus grand malheur, c'est leur couple qui avait volé en éclats.
Depuis rongé par le chagrin, il avait changé de travail et déménagé à plus de 100 kilomètres pour ne pas risquer de revoir Marjorie.
Quel idiot, se dit-il soudain !
La serveuse avait mis un peu de musique.
André s’agaçait d’entendre un fond musical en prenant son champagne. Cela venait briser l'enchantement du bruit du ressac mêlé aux odeurs iodées de la mer et douceâtres du sable chaud apportées par le vent.
Dans son état de tristesse il n'alla pas demander d'arrêter ce zinzin.
Bien au contraire, il reconnut soudain une chanson un peu surannée mais qu’il avait toujours aimée. C'était “Mon ami la rose” de Barbara, chanson qu’il n'avait jamais écoutée attentivement mais dont la mélodie lui plaisait.
« On est bien peu de choses, c'est mon ami la rose qui me l'a dit ce matin. »
André n'avait jamais pensé à associer cette chanson au poème de Ronsard.
Il comprit soudain que c’était maintenant ou jamais de mettre en pratique le Carpe Diem.
C’était à lui de reprendre le contrôle de sa vie.
Après avoir réglé, il partit marcher sur la plage jusqu’à la jetée du port.
L’horizon d’un vert opalescent était une invitation à partir.
Le ballet des bateaux entrant et sortant l’enchantait.
Certains partaient juste pour la journée ou pour une semaine et d‘autres pour des destinations lointaines et remplies d’inconnu.
Il comprit que c’était maintenant à lui de partir pour retrouver la douceur du pays de Marjorie.
Il décida de tout tenter pour reprendre contact avec elle.
Et qui sait, un verre de champagne saura peut-être renouer les fils de leur vie à
deux ?